Saturday, June 4, 2011

"O Grande Amor" - Jazz Hot review

http://www.jazzhot.net/PBEvents.asp?CatID=698830

Review written by French jazz historian Patrick Dalmace about "O Grande Amor" published in "Jazz Hot," the top jazz magazine in France and arguably all over Europe.
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Peter Schärli Trio & Ithamara Koorax
O Grande Amor

Nouveauté-sélection
Fotografia, Sandalia Dela, Setembro, Wedileto, O Grande Amor, Deixa, Para machucar meu coraçao, Zum Zum,
Ithamara Koorax (voc.), Hans Peter Pfammater (p), Thomas Dürst (cb), Peter Schärli (tp).
Enregistré aux Powerplay Studios de Zurich en mars 2010.
Durée : 47mn 36
TCB Music 03172

Pour tous ses concerts en Europe Ithamara Koorax travaille depuis plusieurs années avec le trio -sans batterie- du trompettiste Peter Schärli et, après le disque consacré à la musique de Dom Um Romao il y a trois ans, les trois jazzmen enregistrent une nouvelle fois avec la chanteuse brésilienne. Musique brésilienne ? Chanteuse de jazz ? Ithamara dans une récente interview publiée par Jazz Hot (N° 654) donnait sa réponse et illustre celle-ci avec ce dernier disque. « Un chanteur de musique brésilienne … d’une manière générale chante sans beaucoup de variations, d’une façon rectiligne, comme une ligne droite constante. Dans le jazz, un vocaliste joue avec le rythme, chantant un peu en avant ou un peu en arrière, en phrasant d’une manière créative. Il devient un co-auteur du thème… Les voix en musique brésilienne … n’enregistrent pas de thèmes avec des improvisations de musiciens … Les chanteurs de jazz enregistrent des thèmes plus longs incluant des solos instrumentaux avec lesquels ils interagissent. »

A l’exception de « Wedileto », composé par le pianiste du groupe -thème de jazz avec des accents brésiliens- tous les autres sont l’œuvre de compositeurs brésiliens (Jobim, Vinicius, Lobo, Barroso, Lins, Powell, Claudio). Il s’agit donc pour Ithamara Koorax d’en donner une interprétation jazz qu’elle met en place avec le trio, dont la connaissance de la musique brésilienne est fine et celle du jazz tout autant.

A cet égard le « Sandalia Dela » est caractéristique. Une très courte introduction de la trompette de Schärli et un dynamique démarrage très brésilien de la chanteuse qui laisse un long espace à Schärli (illustrant ce qu’elle dit dans l’interview), solidement appuyé par ses partenaires. Un solo est offert au piano et I.K. reprend son thème en s’appuyant sur ses racines tandis que la formation joue jazz. Moins spectaculaire mais plus profonde la difficile composition de Ivan Lins « Setembro » montre combien la brésilienne maîtrise l’univers des auteurs qu’elle choisit. Le Brésil ne transperce plus qu’en filigrane derrière le jazz d’un trio qui a lui aussi compris Lins.

Une très belle introduction de Hans Peter Pfammater – on découvre sa délicatesse sur les touches- précède l’entrée de Ithamara sur le thème « O Grande Amor », honorant tant Jobim que Vinicius avant de laisser successivement Schärli et Thomas Dürst s’exprimer avec autant de sensibilité que le pianiste. La trompette dialogue avec la voix et le piano appuie la conversation. Très beau ! Et ça dure huit minutes…

On connaît Ary Barroso Roi du samba carnavalesque, on le trouve ici avec « Para machucar meu coraçao » dans un registre très intimiste qui permet à I.K. de s’exprimer dans une veine qu’elle a suivie dans d’autres disques. Elle laisse encore de longues plages à ses musiciens qui, plus que des accompagnateurs, s’affirment dans ce disque comme de véritables partenaires pouvant s’exprimer pleinement à côté de la chanteuse. Encore une fois la trompette de Schärli se distingue, restant dans le registre voulu puis laisse le protagonisme au piano avant le retour de Ithamara et le point final de la trompette.

Le premier thème du disque « Fotografia » relève du même registre assez triste, peut-être datant d’une mauvaise période personnelle pour Jobim, et offre les mêmes opportunités d’expression pour Schärli. « Zum Zum » est lancé par la trompette qui va chercher quelques aigus. Après un passage par le piano il faut attendre deux minutes avant d’obtenir la voix. Le trio a joliment occupé l’espace offert et d’une manière générale s’est parfaitement mis en avant sur cette composition qui toutefois ne permet pas I.K. de briller autant qu’elle le fait dans « Deixa » (Powell/Vinicius), où elle s’investie pleinement -après l’introduction de la trompette- dans une interprétation dynamique et festive soutenue pleinement par l’ensemble du trio et entrecoupée d’une belle prestation du pianiste.

De tout ceci résulte un très bon disque. I.K. ne s’enferme pas dans ce qu’elle a déjà fait. Elle crée, même en interprétant les grands auteurs brésiliens dont elle contribue à faire vivre la richesse sans les momifier. I.K. sait aussi valoriser ses partenaires jazzmen. Le Japon, les USA, l’Allemagne, la Suisse l’accueillent. On se demande pourquoi pas l’hexagone!
- Patrick Dalmace

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